La mainlevée d’un séquestre collectif représente un acte juridique important, marquant la fin d’une situation de blocage portant sur des biens ou des avoirs mis en réserve à la suite d’un litige. Institué pour protéger les intérêts des différentes parties en conflit, le séquestre collectif immobilisait les biens concernés sous l’autorité d’un dépositaire neutre, dans l’attente d’un règlement définitif. Considérée comme une colonie de peuplement, l’Algérie voyait alors sur une grande échelle prospérer la colonisation, avec l’installation d’une paysannerie européenne. Mais en 1871, une grave insurrection souleva la Kabylie. Parmi les sanctions infligées aux Kabyles après le rétablissement de l’autorité, un séquestre fut apposé, à la fois sur des biens collectifs de tribus et sur des biens indigènes individuels. L’arrêté du 31 mars 1871 appliquait le séquestre à toutes les terres rebelles, en vertu du principe de responsabilité collective de la tribu. Puis l’amiral de Gueydon, gouverneur général, autorisa les indigènes à racheter ces terres, en argent ou en terres, au 5e de leur valeur : il leur en coûta 63 millions. En 1873, on constate que 324.000 hectares ontété confisqués à titre collectif et 250.000 hectares à titre individuel. Le séquestre collectif a touché 313 collectivités (en cas de refus de payer une soulte de rachat, des commissions pouvaient exproprier). Il fut liquidé en 1878. Le séquestre nominatif a touché 1778
propriétaires. Une circulaire gubernatoriale de 1874 (91/5 N 1) donne des indications sur la liquidation.
Ce séquestre collectif avait pour but de permettre la création de nouveaux centres de peuplement européen. Il entraînait le refoulement des indigènes, puis le paiement de la soulte de rachat (la tribu étant représentée par sa djemaa). Une contribution de guerre fut également exigée. La sous-série 91/5 N, liée à ces sanctions de la révolte kabyle, se prolonge jusqu’en 1909.
La procédure juridique suivante est la loi du 26 juillet 1873, la loi Warnier dite loi des colons, complétée par une loi de 1887. Ces lois voulaient favoriser la colonisation libre et remplacer le sénatus consulte. La loi Warnier distinguait la propriété constatée (ou privée, ou melk) et la propriété constituée (ou arch). Elle fut publiée au Journal officiel de la République française le 9 août 1873 et au Journal officiel de l’Algérie le 15 août.
Cette loi Warnier permettait de supprimer la propriété collective et de disloquer l’indivision des parcelles appartenant à des indigènes ; elle permit une véritable spoliation légale. La constitution de la propriété privée a même été qualifiée de francisation des terres. La sous-série 91/6 N du présent instrument de recherche en résulte. Elle s’étend jusqu’en 1905.
Ainsi, beaucoup de terres melk indivises furent acquises. Mais les abus commis en ce sens furent révélés au Parlement en 1890. Par la suite, la loi Warnier cessa d’être appliquée ; en revanche, l’administration défendit jusqu’en 1922 la propriété arch, déclarée inaliénable. La mainlevée du séquestre collectif, intervenue après une période d’apaisement et de rétablissement de l’ordre, a marqué un moment crucial pour la communauté. Par décision administrative, la restitution des terres, troupeaux et autres biens a été ordonnée, reconnaissant ainsi la fin des sanctions collectives. Cet acte a permis à la tribu d’Elaouana de recouvrer ses droits traditionnels et de reprendre le cours normal de sa vie économique et sociale.
Au cours de cette année, la décision de mainlevée a été prononcée par l’autorité compétente, constatant soit un accord entre les parties, soit l’issue d’une procédure judiciaire. La levée du séquestre a permis la restitution des biens à leurs propriétaires légitimes, mettant fin aux effets de la mesure conservatoire et rétablissant ainsi la pleine jouissance des droits de propriété. Donc vingt-deux ans après l’insurrection et la mise sous séquestre de la quasi totalité des terres appartenant à la tribu d’El Aouana, et après avoir payé un lourd tribut de guerre, une mainlevée est prononcée par le gouvernement colonial, donnant ainsi aux anciens propriétaires la possibilité de racheter le 1/5 de leurs biens, rares ceux qui ont pus entamer une telle démarche pour manque de moyens dû à l’ appauvrissement général de la population, les terres sont ainsi restées propriété de l’administration coloniale, une grande partie de ces terres avaient déjà été cédées aux colons lors de la création des colonies agricoles(Agadi, Montaigne).
Voici le texte paru dans le JOURNAL OFFICIEL du 29 octobre 1903:
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